Voici en ce troisième dimanche de paque, une double homélie.

la version audio nous invite à nous demander qui aimons nous? => m’aimes tu

La seconde, ci-dessous, donnée en ce jour à la Chapelle par Jean-Pierre Renouard:

1er mai 22                   3 ème dim. de Pâques                       Le Berceau

 

Quel sens donner à nos vies ? Quoi ? Pour quoi ? Comment ? Questions récurrentes qui nous assaillent toujours et alimentent notre imaginaire ; beaucoup rêvent, certains pensent aux fins de mois, d’autres font la chassent au pouvoir, aux plaisirs, à l’argent toujours, ce faux fil qui emmêlent nos illusions ! Quand sonne l’heure du passage, tout fait pschitt ! C’est au cœur de cet imbroglio que ce que nous venons d’entendre, apporte – à contre voie- la seule réponse qui vaille, sonder ce qui vient et l’attendre en travaillant sans cesse à la suite de Celui qui l’ordonne : « Suis-moi ». Mais qu’est-ce qui m’éclaire?

I – Les disciples de Jésus ont vécu une aventure hors normes ; après trois années de découvertes, après passion, mort et résurrection, après l’avoir vu pour certains, ils ont un goût de doute ; ont-ils rêvassé ou sont-ils victimes d’une illusion collective ? Ce jour-là, sept d’entre eux, battent le sable sur le lac quand Pierre leur dit : « Je m’en vais à la pêche » – « On vient avec toi » – choux blancs ! Alors paraît Jésus. Il donne des signes en invitant à jeter le filet qui se remplit à ras-bords et en conviant ces pécheurs d’occasion à manger du produit de leur travail avec du pain qu’il a lui-même préparé. Alors dans leurs esprits enténébrés, ressurgit le passé: les scènes des multiplications, la pêche miraculeuse du début de son ministère en Galilée et surtout le dernier repas de Jésus, la Cène. Le constat s’impose : puisque le filet ne s’est pas déchiré, le solitaire du Lac est bien Jésus, même s’ils en restent bouche bée !

 

II Voilà qui est instructif. Entre beaucoup d’autres, je lis dans cette rencontre merveilleuse, ces quelques perspectives. Le Seigneur ressuscité nous rejoint au cœur de notre existence terrestre. Trop souvent nous pensons que Dieu se manifeste à l’homme dans l’extraordinaire et l’inédit et pour un peu, nous attendrions tous cette irruption soudaine. Son habitude est autre. Comme au bord du lac, il se mêle volontiers aux hommes. Il aime les rejoindre en plein dans leur vie et dans leur quotidien, fait de travail et de peines. Depuis l’Incarnation, il chemine avec nous dans notre labeur, dans notre repos, dans notre prière. Il est notre compagnon de route et s’intéresse à tout ce que nous faisons, à notre activité, à nos engagements de femmes et d’hommes ! Rien de ce que nous vivons, de ce que nous faisons ne lui est étranger ; nous devenons ses collaborateurs.C’est à partir de ce quotidien que se bâtit le Royaume de Dieu. Le filet de 153 gros poissons est l’image de l’Eglise, ce corps d’humains dans lequel se coule Dieu.

Un autre enseignement de cette rencontre au bord du lac est tiré de ce repas, préparé et servi par Jésus Serviteur lui-même. Il est fait pour signifier la Cène, l’Eucharistie même si le poisson s’ajoute au pain ! Rappels de la nourriture pour tout notre être. Désormais, en Eglise, le repas eucharistique, la messe, est la voie royale pour trouver Jésus. Plus que compagnon de route, Jésus est compagnon de vie grâce au pain partagé. C’est le lieu du rendez-vous privilégié, au moins chaque dimanche, le signe vivant de la présence du Christ. Plus nous « eucharistions » notre vie, plus elle s’enrichit de Jésus.

 

III. Poursuivons et achevons. Après ces agapes, il y a l’aparté avec Simon-Pierre. Moment lourd de sens collectif. La question posée trois fois n’est pas sans rappeler le chant du coq de la Passion annonçant la trahison du chef des Douze. Chaque baptisé est invité à revivre son premier amour » et à ses premières défaillances. Mais celles-ci peuvent-être dépassées. Pierre reçoit sa mission phénoménale au cœur même du rappel de ses blessures morales qui resurgissent quand Jésus lui demande s’il l’aime « plus que ceux-ci, vraiment » comme au temps de son amour premier.

Cette question – « M’aimes-tu ? », Jésus la pose aujourd’hui à chacun : « Suis-je à Lui ? » C’est lui, le sens de notre vie, il est notre horizon, notre fidélité dernière. En même temps, Jésus nous lance l’invitation à prendre soin du peuple de Dieu : « Sois le pasteur de mes brebis ». D’où la question : « Suis-je ce veilleur ou un employé de cette ONG qui s’appelle Église?», insiste souvent le Pape François. Il exhorte chacune et chacun en disant par exemple : « fais paître ! » Parce que le Seigneur nous a appelés pour cela, évangéliser. Et ce sera toujours difficile à vivre. Pour aider le Christ berger, on ne peut atteindre la « gloire » sans la croix : « Cela finira de la façon la plus commune, et aussi la plus déroutante, dans l’abandon : « on te fait manger, on doit t’habiller, on te met au lit». « Inutile, malade, comme « le grain qui meurt, et le fruit viendra après ».

Alors, Jésus conclut son dialogue : « Suis-moi ! ». Qui a « perdu la direction » ne sait pas « comment répondre à la question de l’amour comme à la question d’être guide pour autrui ». Mais le Seigneur ne le laisse pas seul, même dans les moments les plus difficiles de sa vie ».

Qui a la certitude de sa présence permanente à ses côtés est capable de tout.[1]  AMEN

[1] D’après l’homélie de François du 6 juin 2014 à Sainte-Marthe